Fri-Son X La Landwehr — Borderline Experience

Prestations | 18.10.2023

Dans la pénombre de la salle principale du Fri-Son commence à éclore des petites lumières sur les lutrins des landwehriens. L’ambiance est installée. Un piano-man, une chanteuse et l’ensemble de la Landwehr lancent la soirée d’anniversaire des 40 ans de ce lieu mythique de la nightlife fribourgeoise qu’est Fri-Son.

 

Les premières notes du piano de Stefan Aeby retentissent et le public, debout, se rapproche des musiciens. Vient s’entremêler au son du piano la voix, douce mais puissante, d’Hannina Haug. Borderline expérience, œuvre composée sur la base d’un Lied de Schubert (Winterreise), commence à retentir dans la salle. Les mélodies de l’époque classique et romantique laissent cependant rapidement place à des sonorités plus modernes. Le premier mouvement, Gute Nacht, commence par être joué dans sa forme originellement pensée par Schubert, puis Aeby reprend la main en y ajoutant progressivement des sons plus électroniques. Dans un registre grave, les vents posent le tempo sur des triolets ponctués d’accents intempestifs. Le deuxième mouvement suit sans interruption. Erstarrung (la stupéfaction), c’est le cas de le dire ! Le caractère scherzo du mouvement voit dialoguer les voix graves avec les voix aiguës. Le piano reprend ensuite ce dialogue et la voix de la chanteuse vient apaiser les discussions mélodiques. Dans une mélancolie qui laisse transparaître la solitude, le troisième mouvement débute (Einsamkeit). Mais cette solitude est brisée par l’entrée des bois aiguës qui s’agitent et finissent par pousser un cri venant du cœur. Les cors viennent calmer les ardeurs de la solitude mais cela ne suffit pas puisque la voix de la chanteuse se voit animer par une flamme (4ème mouvement : Irrlicht). D’une note frappée sur le piano, ressort la voix plaintive de la chanteuse. Dans une parfaite intonation, le piano et la voix humaine s’accordent sur des gémissements élégiaques. Viennent peu à peu se rajouter à ce duo des groupes d’instruments d’harmonie. En commençant par les claviers, puis les cuivres et enfin les bois, les mesures se suivent et s’enchevêtrent pour terminer la pénultième partie de cette expérience. L’orchestre finit par retomber sur ses temps lorsque retentissent les notes du dernier mouvement, Leiermann.

 

Cette fougueuse pérégrination laisse planer sur le public un sentiment alourdissant où la dernière note tenue résonne encore. Cette pièce a été écrite pour une salle telle que Fri-Son et un public qui ne côtoie pas habituellement les concerts de la Landwehr. Au moment de saluer, l’orchestre a compris qu’il avait emmené l’assemblée dans des contrées lointaines et que son objectif de faire vivre des émotions musicales avait été atteint.

  • Photos : André Bulliard

  • Photos : André Bulliard

  • Photos : André Bulliard

  • Photos : André Bulliard

  • Photos : André Bulliard